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Résumé:
Sans me vanter, vers les six ou sept ans, j'avais
déjà tâté pas mal de choses, pour ce qui
est des délits interdits par la loi. Vol à
l'arraché, viol, extorsion de fonds...
On m'appelait «la Terreur». Je trouvais ça
génial.
À l'époque, dans la maison, on était cinq et
des poussières : mes parents, mon frangin et moi,
pépé Jean, feu mémé Ginou.
Sauvé d’une chute dans la Seine, un homme un peu
ours et misanthrope de 67 ans, se retrouve immobilisé dans
un lit d’hôpital pendant un mois et demi. Cela lui
donne le temps de revisiter sa vie, avec ses bons et mauvais
côtés, et surtout de rencontrer des personnes
inattendues, lui qui n’attendait plus beaucoup de
surprises dans sa vie. Après ses deux précédents
romans, Vivement l’avenir (2010) et son grand
succès, La tête en friche (2009), adapté au
cinéma par Jean Becker, Marie-Sabine Roger poursuit dans
sa veine humaniste et souvent drôle sa galerie de
portraits hauts en couleur.Extrait
Question viol, j'avais roulé une pelle à
Marie-José Blanc. Elle serrait les dents, je n'étais
pas allé loin. C'est l'intention qui compte.
Le vol à l'arraché, c'était le samedi après
le match de rugby : je taxais le goûter des plus petits
que moi. Je les baffais, peinard, au chaud dans les vestiaires.
J'en épargnais un, quelquefois. J'ai un côté
Robin des Bois.
Pour l'extorsion, demandez à mon frère. Il me citait
toujours comme exemple pourri à ses gamins, quand ils
étaient petits, Devenez pas comme votre oncle, ou vous
aurez affaire à moi. Pour ma défense, je dirais que
s'il n'avait rien eu à se reprocher, il n'aurait pas
raqué toute sa tirelire. Pour faire chanter les gens, il
faut une partition.
Je me sentais promis à un grand avenir.
Mes grands-parents paternels étaient morts bêtement,
lorsque mon père avait huit ans, pour un refus de
priorité causé par ma grand-mère, qui ne voyait
pas trop l'utilité des stops.
Mon père avait été élevé par ses
grands-parents du côté de sa mère :
pépé Jean, encore très présent à
l'époque dont je vous parle, et feu mémé Ginou,
dans son urne, au garage.
J'avais du mal à me représenter ce qu'il avait pu
ressentir, en rentrant de l'école, le jour de l'accident,
lorsqu'il avait compris que ses parents n'allaient pas revenir.
Sur le moment, il s'était peut-être dit qu'il
pourrait enfin vivre en toute liberté : plus de claquage
de beignet à la moindre bêtise. Tranquille.
Tranquille, oui.
Mais à l'entendre parler de ses années d'enfance, je
sentais bien que certaines tranquillités foutent une vie
en l'air plus sûrement que pas mal de contraintes. Du
coup, ça ne me tentait pas, devenir orphelin. Je tenais
à mes parents, même si c'était des parents, avec
tous les défauts que ça peut sous-entendre, question
autorité et interdictions. Je tenais à mon père,
surtout. Je le trouvais balèze, pas seulement pour ses
biceps plus épais que des cuisses. Il était fort,
vraiment. Droit planté dans ses bottes. Riche de
convictions, à défaut d'autre chose. Un gueulard, un
sanguin, mais qui trempait ses mouchoirs aux mariages, aux
baptêmes, appelait ma mère Mon p'tit bouchon d'amour,
en se foutant pas mal du ridicule, et n'avait jamais peur de
lui dire Je t'aime.
L'homme que j'aurais sûrement bien aimé devenir.Présentation de l'éditeur