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Résumé:
Avec Dans le nu de la vie, récits des marais
rwandais, Jean Hatzfeld avait recueilli les récits des
rescapés tutsis du génocide rwandais. Après de
longs séjours sur place, dans la prison où ils
étaient enfermés et jugés, il fait maintenant
parler les acteurs hutus de ce génocide des mêmes
collines. En l'occurrence une bande d'amis : cultivateurs,
instituteurs, commerçants, qui, comme ils disent, sont
En 1994, au Rwanda, 800 000 Tutsis ont été
massacrés, en douze semaines, par leurs concitoyens
hutus. Soit près de 10.000 personnes par jour,
principalement à la machette. Jean Hatzfeld, journaliste
à
Libération, avait déjà rendu compte
de ce génocide sans précédent en donnant la
parole aux rescapés des massacres de la région de
Nyamata dans un témoignage bouleversant,
Dans le nu de la vie. Récit des marais
rwandais : sur une population de 59.000 personnes,
50.000 avaient été tuées par leurs voisins
hutus.
ÉLie : «...
Au fond, un homme c'est comme un animal, tu le tranches
sur la tête ou sur le cou, il s'abat de soi. Dans les
premiers jours, celui qui avait abattu des poulets, et
surtout des chèvres, se trouvait avantagé; ça
se comprend. Par la suite, tout le monde s'est accoutumé
à cette nouvelle activité et a rattrapé son
retard... Le boulot nous tirait les bras... ... Personne ne
peut avouer l'entière vérité. Sauf à se
damner aux yeux des autres. Et ça, c'est trop grave.
Mais un petit nombre commencent à raconter des bouts
terribles. C'est grand-chose... Les fauteurs savent plus que
des souvenirs et des précisions élémentaires,
ils ont des secrets dans l'âme... »
Il a toujours semblé que les tueurs d'un
génocide, trop dépassés par
l'énormité de leurs actes, ne pouvaient que mentir
ou se taire. Dans un pénitencier près de Nyamata,
une bourgade rwandaise, l'auteur a rencontré un groupe
de tueurs. Des copains, sans contact avec le monde
extérieur et déjà condamnés. Au fil de
mois de discussions, ils ont montré l'envie de raconter
ce « brouhaha» de l'extermination, de dire
précisément l'indicible. Pour renouer avec nous?
Renouer avec les braves cultivateurs ou instituteurs qu'ils
avaient été? Au plus près du mal absolu, le
génocide, qu'il soit juif, gitan ou tutsi, leurs
récits et les réflexions de l'auteur apportent
autant de questions que de réponses. Jean Hatzfeld a écrit
Dans le nu de la vie. Récits des marais
rwandais.
--Ce texte fait référence à une
édition épuisée ou non disponible de ce
titre.
allés " au boulot " ensemble, à horaires
réguliers. Des hommes qui ont, pendant plusieurs
semaines, systématiquement " coupé " leurs "
avoisinants ", avec la claire idée de les faire
totalement disparaître. Ils parlent ici de façon
directe, sans souci d'atténuer leurs actes, même
s'ils ne peuvent comprendre leurs responsabilités. Ils
racontent les monstres qu'ils ont été et, de
façon ahurissante, les hommes ordinaires qu'ils
étaient avant et qu'ils espèrent nous faire croire
être redevenus. Jamais aucun " génocidaire " du
siècle n'a témoigné ainsi, ce qui fait d'Une
saison de machettes un livre exceptionnel, unique, d'une
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Dans
Une saison de machettes, Jean Hatzfeld a
retrouvé une douzaine de ces assassins hutus,
agriculteurs pour la plupart, en attente d’un jugement
ou déjà jugés dans la même commune de
Nyamata, et leur donne la parole. Adabert, Alphonse, Ignace,
Elie, Léopord, Jean-Baptiste, Pancrase, Pro, et les
autres, racontent en toute bonne foi, "avec une énorme
franchise, souvent même avec candeur", observe
l’auteur, cette année 1994 où tout a
basculé après l’assassinat du président
rwandais. "On s’assemblait sur le terrain de foot en
bande de connaissance, et on allait en chasse par
affinité", "On pensait qu’on pouvait
désormais se débrouiller sans Dieu",
expliquent-ils. Et de raconter comment eux, Hutus,
s’armant de machettes, en se mettant à piller,
à violer, à tuer aussi systématiquement que
férocement, ont pris leur revanche sur l’ethnie
des Tutsis qui avaient tenu les clefs du pouvoir pendant une
longue période.
Dans cette grande enquête sous forme de
récit, Hatzfeld analyse le processus du génocide.
Ou comment de simples agriculteurs, placés dans une
situation exceptionnelle et encadrés par les
autorités locales, en sont venus à massacrer leurs
voisins, sans état d’âme, par conformisme,
mais avec le souci de bien faire le "travail", jusqu’au
bout. "Tuer était moins échinant que cultiver", dit
l’un. "Je tuais sans conséquences, je
m’adaptais sans problème", se souvient un autre.
À la fin du récit, les douze hommes acceptent de
poser pour une photo, comme une bande de copains. Nulle trace
de repentir dans leur discours, ni de mauvaise conscience.
Récit d’une précision et d’une
cruauté glaçante,
Une saison de machettes est un ouvrage essentiel qui
force le lecteur, frappé de stupeur, à garder les
yeux ouverts pour regarder en face la banalité du mal.
--Denis Gombert
--Ce texte fait référence à une
édition épuisée ou non disponible de ce
titre.
Quatrième de couverture